La
remise en cause brutale de nombreux financements liés au soutien à la
création, à la démocratisation de l’accès à la culture, à la politique
de la ville, à l’éducation, l’enseignement supérieur et la formation
professionnelle artistiques ou encore aux actions internationales,
suscite inquiétude, indignation et colère [1] chez tous ceux qui œuvrent au quotidien pour l’art et la culture.
Cinquante ans de politiques culturelles innovantes et
audacieuses ont permis la création d’un maillage culturel territorial
quasiment unique au monde. Des salles de cinéma, des théâtres, des
bibliothèques, des lieux de spectacles et d’expositions, des
orchestres, des artistes de toutes formes d’expression artistique
(théâtre, danse, musique, cinéma, arts visuels, arts du cirque et de la
rue…) qui se déplacent sur tout le territoire, des associations, des
festivals et manifestations liés à tous les arts, permettent partout en
France, à un vaste public de rencontrer des œuvres, leurs auteurs et
interprètes.
Aujourd’hui, cette richesse collective est mise en péril.
« Le budget d’austérité » proposé par notre ministre de
la Culture et de la Communication et par le Premier ministre, ainsi que
les arbitrages annoncés pour l’année 2008, les perspectives sombres des
futurs budgets bientôt triennaux nous alarment à juste titre. La part
de la culture représente déjà moins de 1 % du budget de l’État. Comment
accepter que le budget de la culture soit encore révisé à la baisse ?
Des dizaines de milliers d’emplois sont concernés.
L’existence même de nombreuses actions et structures est menacée. Mais,
par-delà l’aspect financier, c’est le renouvellement des talents,
l’unité et la solidarité entre générations, le droit à accéder aux
langages de l’art, à l’expression et à la création qui sont en danger.
Les collectivités locales, depuis des années,
interviennent massivement en faveur de l’art et de la culture. Si elles
sont amenées à jouer un rôle plus important, l’État a un rôle à jouer
pour garantir l’égalité entre les territoires et assurer la cohérence,
la complémentarité et la diversité des politiques publiques pour la
création artistique et son appropriation citoyenne.
Nous soutenons que l’État doit
affirmer le caractère essentiel de la création, le droit inaliénable
pour tout être humain d’accéder à l’imaginaire et à la pensée, à
l’éveil sensible et à l’esprit critique par l’art et la culture.
Pour cela, il doit :
garantir
la diversité des créations, tant dans leurs moyens de production que de
diffusion, et non les réduire à des produits de consommation culturelle
en les livrant à la seule loi du marché ;
assurer
à tout citoyen la rencontre avec des œuvres en accompagnant de manière
volontariste l’action et la diffusion culturelles, et en épaulant les
artistes et les relais institutionnels et associatifs ;
maintenir
et promouvoir l’éducation artistique dans les programmes de l’Éducation
nationale en lien avec le ministère de la Culture et de la
Communication. Réconcilier les enfants, à l’école comme à la
télévision, avec toutes les formes d’intelligence ; les aider dans les
établissements scolaires comme à l’extérieur, à distinguer une œuvre
d’un produit ; leur donner le choix des arts dans leurs diversités, en
faire une chance et une arme contre les déterminismes et les divisions.
L’État doit contribuer réellement au financement de
cette ambition qui fait de la France une exception et lui confère son
rayonnement et son attractivité internationale. Nous devons résister à ces bien maigres économies qui causeront de bien grands dégâts (Victor Hugo).
À quelques semaines de la présidence française de
l’Union européenne, nous nous devons de relancer le débat national pour
le porter ensuite au niveau communautaire.
Rassemblant toutes les disciplines artistiques, nous
exigeons que cette question cruciale soit replacée au cœur des
préoccupations de notre société.
Aussi appelons-nous à la
mobilisation pour une politique culturelle ambitieuse, intelligente et
généreuse, à la hauteur de l’enjeu démocratique.
Signer ce manifeste