Jean
Sarkozy est un jeune homme pressé. Trop, sans doute, pour avoir le
temps d’ajuster ses déclarations et ses actes. Le nouveau conseiller
général de Neuilly-sur-Seine, délégué à la jeunesse à l’assemblée
départementale des Hauts-de-Seine, avait annoncé en avril dernier son
intention d’organiser des états généraux de la jeunesse à la rentrée
prochaine et, cela allait de soi, une grande concertation dans le
département.
Dans une lettre adressée le 23 avril aux 36 maires, accompagnée d’un
simple document technique de travail, il soulignait sa volonté
d’élaborer « un diagnostic partagé des forces et des faiblesses de la
politique de notre département concernant les jeunes » et il annonçait
des « assises de la jeunesse » avant la fin de l’année pour préparer un
plan d’action départemental. Jean Sarkozy souhaitait dans cette missive
aux maires recueillir leurs observations et propositions. Depuis, plus
rien. Les maires attendent toujours un document sérieux à étudier, une
esquisse de plan qui pourrait leur servir de base de travail. Et les
conseillers généraux, tout de même bien placés pour juger d’un plan
d’action qu’ils doivent approuver, n’ont pas été conviés à la
réflexion. C’est ce qu’a dénoncé publiquement mercredi dernier le
groupe communiste au conseil général. Patrick Alexanian regrette que
les élus du département aient été écartés, qui fait craindre « une
absence de pensée collective sur ces états généraux ». « Qui va
organiser ces états généraux ? Qui allons-nous rencontrer ? Quelles
associations, quels jeunes ? Comment créer les conditions d’un dialogue
à égalité ? » Les élus communistes s’interrogent et remarquent que la
jeunesse d’un département riche comme les Hauts-de-Seine rencontre un
peu partout des difficultés pour s’insérer dans la société. Problèmes
aigus de logement, de transports, de formation, d’accès aux études. Ce
n’est pas forcément une chance d’avoir moins de vingt-cinq ans dans les
Hauts-de-Seine où tout est fait pour favoriser l’élite : le logement
est hors de prix, le logement social inaccessible ; contrairement au
Val-de-Marne ou à la Seine-Saint-Denis, le département ne subventionne
pas du tout la carte jeune Imagine R ; le conseil général a supprimé
les bourses directes aux lycéens et étudiants pour créer une bourse au
projet, Voc@tion 92, seule aide existante aux étudiants qui se révèle
aujourd’hui un échec. C’est révélateur, le budget consacré à la
jeunesse et au sport a diminué, depuis trois ans, de plus de 700 000
euros entre 2007 et 2008.
Dans ces conditions, les élus communistes se demandent si les états
généraux ne masquent pas ces coupes claires dans les budgets, une
opération communication avec strass et paillettes, comme l’avait
d’ailleurs fait Nicolas Sarkozy lors de son arrivée à la présidence du
conseil général. Jean Sarkozy a vivement réagi dans un entretien au
journal Première Heure aux interrogations du groupe communiste sur sa
méthode en parlant d’attaque « de mauvaise foi ». Réponse de Patrick
Alexanian : que Jean Sarkozy produise le courrier qu’il s’est engagé à
adresser à ses collègues du conseil général. « Si c’est de concertation
dont on parle, à ce jour aucune discussion n’a été organisée entre les
élus de la commission jeunesse dans laquelle je siège », ajoute l’élu,
qui se dit disponible comme tous les conseillers généraux et appelle
finalement les jeunes du département « à prendre eux-mêmes ces
affaires, leurs affaires en main ».
Jacques Moran
Article paru dans l'Humanité le 28 juin 2008